L'obscurité se referme autour de mon corps recroquevillé dans les draps soyeux. Un sentiment de réconfort m'envahit alors. Ainsi posé, il est temps pour moi de m'évader dans mon monde. Là où l'aventure m'appelle.

Pas que ma vie ne me convienne pas, bien au contraire. J'aime ma famille, les moutons que nous élevons, cette maison. Pourtant, malgré la peur que je puisse ressentir, face à l'inconnu, j'ai tout de même envie de découvrir de nouvelles choses. Peut-être est-ce égoïste, mais cela ne doit pas plus me perturber.

J'entends Slade me taquiner une fois de plus. Il aime bien jouer avec mes peurs et mes réactions parfois excessives. Faisant claquer ma langue contre mon palet de manière bruyante, aucun son ne sort pourtant pas de ma bouche. Ce soir, je ne lui ferai pas le plaisir de le voir gagner la partie. Bien sûr, il doit savoir tout de même ce que je souhaitais dire au vu de son petit rire.

Qu'est-ce qu'il peut m'énerver. Pourquoi ai-je un gardien aussi idiot ? Encore une question à laquelle j'ai une réponse toute trouvée. Nous nous ressemblons plus que je veuille le faire croire. Je suis juste moins franche que lui, ayant peur de ce que je pourrai répondre sur le coup. On ne dirait pas pourtant, n'est-ce pas ?

En même temps, montrer un visage calme face aux autres ne veut pas pour autant dire que l'on est réellement comme cela. Gentille ? Oui, on me l'a dit bien souvent, mais que voulez-vous. J'aime mes proches, je ferai tout pour eux, même si cela revient à ne pas honnête envers ma propre personne.

Un frisson parcourt mon échine. Je n'aime pas cette sensation. Est-ce que parcourir le monde m'aiderait à me faire gagner en terme de maturité ?

"Tu es pourtant mature Karis. Oui, tu réagis beaucoup trop vite, pour mon plus grand bonheur d'ailleurs. Pourtant, tu sais réfléchir par toi-même et prendre les bonnes décisions lorsque la situation l'exige. Tu as le cœur sur la main, mais tu parviens à faire la part des choses. Bon d'accord, tu devrais arrêter de te prendre la tête pour des futilités, mais on ne te refera pas. C'est très drôle en plus, mais comme on dit, une idiote restera une idiote pour toujours. J'aime bien ce côté-là et je ne partirai pas, sous aucun prétexte. Il faut bien que je me moque de toi."

Son monologue n'en fini plus, mes paupières deviennent de plus en plus lourdes. Il devient vraiment barbant avec son discours soporifique. Oui, je l'aime mon Slade et pour rien au monde, je ne le regretterai. Quoique.

"Et moi aussi, je t'aime Karis. Maintenant bonne nuit et fais de beaux rêves remplit de moutons tout doux."

C'est dans un des villages d'Eriu que j'ai vu le jour, il y a de cela vingt-six ans. Que le temps passe vite, beaucoup trop à mon goût. Nous n'avons pas assez le temps de faire ce que nous souhaitons réellement.

Quand je suis née, mes parents avaient déjà eu un garçon de trois ans mon ainé. Je me souviens que l'on jouait beaucoup ensemble avant qu'il ne décide de partir pour la ville. En voilà encore un qui préfère le monde que cette tranquillité. Quoique, je ne suis peut-être pas la meilleure placé pour dire ses mots. J'avoue, que j'ai été beaucoup intriguée moi aussi. Même encore aujourd'hui. Pourtant, je reste à Eriu, à aider ma famille. Ce que je fais ?

Depuis mon plus jeune âge, je m'occupe de notre troupeau de moutons. On les nourrit, les bichonnes... On les tond aussi enfin de pouvoir revendre la laine et ainsi, de pouvoir subvenir à nos besoins.

Par moment, nous avions la visite de mon frère. Dès lors, de nouvelles aventures venaient se rajouter aux précédentes. Il nourrissait déjà mon imagination florissante avec ses nouvelles connaissances sur le monde qui nous entoure.

Comment dire, j'ai l'impression de voir à travers ses yeux et je tiens à dire que j'aimerais le découvrir par moi-même.

Puis un beau jour, il y a bientôt quatre ans, le voilà qu'il m'avait offert une très jolie pierre azurée. Un éclat fascinant qui avait réveillé en moi un étrange sentiment. Impossible de dire ce que c'était, mais cela a changé ma vie. De mes fines mains, j'avais pris la pierre tout en fermant les yeux. J'ai encore cette sensation de chaleur me parcourant lorsque je repense à cette scène.

Puis, quand j'avais ré-ouvert les yeux, il était là à me regarder avec malice. Non, pas mon frère, mais bel et bien cet idiot de Slade. Qui n'a pas changé d'un poil depuis.

J'étais devenue un mage, éleveuse de moutons. Oui, c'est assez comique, je vous l'accorde. L'endroit est beaucoup trop tranquille n'est-ce pas pour un mage ? Qui sait, peut-être que la prochaine fois, je repartirais enfin avec mon frère. Et au fond, ne cherche-t'il pas cette option en revenant plus souvent me voir qu'auparavant.

La roue tourne, des chemins se dévoilent, des liens se tissent. Faut-il encore savoir prendre cette opportunité entre nos doigts.